L’art fromager français face au défi climatique

Le changement climatique et ses conséquences influent sur la qualité gustative des fromages. En France, nombreux sont les professionnels de cette tradition culinaire emblématique qui voient leur savoir-faire ancestral bousculé par cette problématique.

Vous est-il déjà arrivé de constater que votre comté du jour manque de saveur alors qu’il provient de la même épicerie du coin où vous vous approvisionnez depuis des années ? Il importe de prendre du recul avant d’accabler le fromager, car ce n’est peut-être pas vraiment de sa faute.

En effet, s’il est admis que les bons ingrédients font les meilleurs repas, il en est de même pour le fromage : la qualité du lait utilisé est essentielle au produit fini. Problème : celle-ci dépend directement de l’alimentation des vaches laitières.

Selon que la vache se nourrisse de maïs, de foin ou d’herbe fraîche, la qualité de son lait varie, et par conséquent celle du fromage qui en découle.

Les scientifiques de l’Inrae et de VetAgro Sup l’expliquent clairement dans Le Parisien : « Quand les vaches se nourrissent d’herbe au pâturage, les fromages sont plus fondants, plus jaunes et plus aromatiques. Tandis que lorsqu’elles mangent peu ou pas d’herbe, les fromages sont plus blancs, plus fermes et ont des goûts moins prononcés ».

Quand la science révèle les secrets du goût

Cette conclusion s’appuie sur une nouvelle étude l’Inrae mettant en lumière ce phénomène peu connu du grand public. En observant quatre groupes de dix vaches nourries avec des régimes différents, les auteurs – l’Inrae – ont pu démontrer que l’herbe fraîche du pâturage constitue l’ingrédient secret de l’excellence fromagère.

En effet, les résultats de cette expérimentation publiés le 5 mai dernier révèlent une corrélation directe et mesurable entre l’alimentation des vaches et les caractéristiques organoleptiques des fromages produits.

Cela traduit des modifications profondes dans la composition biochimique du lait, directement liée à l’alimentation des vaches productrices. « C’est essentiel de bien nourrir les vaches pour faire du bon fromage », affirme Jean-Marie Beaudoin, fabricant de fromages et produits laitiers bios, cité par Le Parisien.

L’adaptation, un défi supplémentaire

Bien nourrir les vaches constitue donc désormais un défi supplémentaire avec le changement climatique, comme le souligne Antoine Thibault. Cet éleveur laitier normand s’étonne, dans les colonnes du quotidien francilien, de voir désormais « l’herbe griller au mois de mai ».

De quoi l’obliger à repenser le système d’alimentation de ses bêtes, puisque selon ses observations, la période de pâturage est passée de « 150 jours il y a quinze ans » à « 110 jours dans les champs par an en moyenne ».

Il propose donc à ses vaches une ration équilibrée, composée pour moitié d’herbe enrubannée et pour moitié de maïs, lorsque les conditions climatiques empêchent le pâturage traditionnel.

Depuis une douzaine d’années, Hélène Freger, dans le Cher, pousse plus loin cette logique d’anticipation en enrichissant l’alimentation de sa soixantaine de vaches laitières avec un mélange de légumineuses et de plantes particulièrement riches en nutriments.

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