En Côte d’Ivoire, les acteurs de la filière banane ont lancé, le jeudi 26 septembre à Abidjan, une plateforme de concertation de la chaîne de valeur. Objectif : garantir des conditions de travail dignes et un salaire décent aux producteurs. La grande distribution européenne est invitée à s’associer à cette démarche.
La Côte d’Ivoire est le premier producteur africain de bananes (7e mondial) avec plus de 300 000 tonnes par an, dont 80% expédiées vers l’Union européenne. Pourtant, les paysans ivoiriens restent pauvres pour la plupart. Ils ne profitent pas des fruits de leur dur labeur, à cause des prix du marché de plus en plus bas. Face à cette situation, les acteurs de la filière s’organisent pour apporter une réponse collective, qui garantirait des conditions de travail dignes et un salaire décent aux producteurs.
Une rencontre pour jeter les bases d’une meilleure coopération dans la filière banane
Dans ce cadre, l’Organisation des producteurs-exportateurs de bananes, d’ananas, de mangues et autres Fruits de Côte d’Ivoire (OBAM-CI) et l’Organisation centrale des producteurs-exportateurs d’ananas et de Bananes (OCAB), en partenariat avec l’Association des producteurs africains de bananes et d’autres fruits (Afruibana), ont tenu une rencontre à Abidjan cette semaine.
Pendant 3 jours, du 24 au 26 septembre 2024, ces organismes ont échangé sur le contexte et les enjeux du salaire décent et sur la responsabilité dans le secteur de la banane, qui fournit 3 % du PIB ivoirien et plus de 45 000 emplois. Les discussions visaient à jeter les bases d’une coopération véritable entre les producteurs locaux, les distributeurs européens et diverses organisations internationales, dans le cadre d’un dialogue social devant aboutir à un accord de branche dans deux ans.
La banane ivoirienne payée à bas prix
Jean-Marie Kakou-Gervais, président de l’OBAM-CI et vice-président d’Afruibana, a déploré que la banane soit le fruit le moins cher sur le marché international, alors qu’elle est le plus produit et exporté. Pour mieux souligner ce paradoxe, il a pris en exemple la pomme de Normandie, vendue à Paris deux à trois fois plus chère qu’une banane produite à des milliers de kilomètres de la France, et transportée dans des conditions techniques plus contraignantes.
Pourtant une banane écologique
Jean-Marie Kakou-Gervais juge cette situation d’autant aberrante que les agriculteurs ivoiriens produisent « de la banane propre », c’est-à-dire sans pesticides. Une telle banane devrait plutôt revenir chère. Hélas, ce n’est pas le cas. Les agriculteurs ivoiriens, et plus largement africains, pâtissent de la faiblesse des prix. D’où le besoin « de créer un centre de concertation afin que la question du salaire décent ne nous soit pas imposée » par « une entité loin de la scène de production », a préconisé le président de l’OBAM-CI.
Un groupe de travail paritaire pour négocier l’accord de branche
Pour Serge Ekpo, représentant du ministre ivoirien de l’Emploi et de la Protection sociale, cette démarche doit impliquer tout le monde : les producteurs, les distributeurs, le gouvernement et les consommateurs. « Chacun a un rôle à jouer pour veiller au respect des droits des travailleurs ainsi qu’à leur bien-être », a-t-il déclaré. A l’issue des trois jours d’échange, les participants ont signé la charte de fonctionnement du groupe de travail paritaire. Celui-ci doit négocier l’accord de branche qui permettra d’harmoniser l’ensemble des pratiques salariales.
Les distributeurs européens invités à s’associer à cette démarche
En attendant l’accord de branche, d’ici fin 2026, les acteurs de la filière banane ont produit une déclaration d’intention. Cette initiative reflète leur engagement collectif à créer un cadre de dialogue et de coopération, de l’amont à l’aval de leur chaine de valeur. Les participants ont également invité les acteurs de la grande distribution européenne à s’associer à cette démarche, afin qu’elle puisse inspirer d’autres filières agricoles. Pour sa part, le gouvernement ivoirien a exprimé sa volonté d’accompagner le secteur dans cette voie.